Ambulance A2 : bientôt une réalité en France ?

par | 13, Fév 2023 | Module 6 : sécurité du transport sanitaire, Module 8 : Règles et valeurs professionnelles

Je lisais un article il y a peu concernant les négociations de nos chefs d’entreprise avec les organismes de l’assurance maladie, et bien d’autres acteurs. Comme on le sait toutes les évolutions sanitaires, comme économiques sont en permanente remise en question, chacun cherchant à s’octroyer une part d’économie ou encore de gain. Certains pour en vivre d’autre pour en survivre.

Et un sujet a particulièrement attiré mon attention et je me suis intéressé au sujet pour essayer de vous en délivrer quelques notions assimilées ici et là. La fameuse ambulance type A2 dédiée au transport de patients multiples. Attention on ne parle pas de faire un transport en brancard avec 15 autres patient. On parle de rationnaliser et favoriser le transport et l’autonomie de patients.

L’ambulance type A2 : Critiquer mais avec des arguments

Je sais que je publie un article qui va faire trembler les chaumières et certains soit disant bienpensant et vigilant (pti clin d’œil). Attention cet article est à prendre avec un certain recul et une prise en compte de nombreux paramètres. C’est une réflexion et non une certitude en soi. Il va de soi que certains cas de figures particuliers comme le patient immuno déprimé, porteur de germes ou bactérie ou virus, avec pathologie complexe ; et j’en passe car la liste est potentiellement très longue ; que je ne mélange pas tous. MAIS car il y a un mais il y a une partie des patients dont les critères ne sont pas forcément aussi opposables. Donc ouvrez vos esprits !

L’ambulance A2 c’est quoi exactement

Si on en s’en réfère aux normes, la norme EN 1789 en ce qui concerne l’Europe et ses standards voici ce que la fiche fait ressortir :

Type A : Ambulance pour le transport de patient.  Ambulance routière conçue et équipée pour le transport sanitaire de patients dont l’état de santé ne laisse pas présager qu’ils puissent devenir des patients en détresse.

  • Le type A1: adaptée au transport d’un patient unique,
  • Le type A2 : adaptée au transport d’un ou plusieurs patients sur un (des) brancard(s) et/ou fauteuil(s). 
  • Le type A2 comprend donc une cellule sanitaire type A avec un équipement médical identique au type A1. La différence se situe dans la présence d’équipement de type hayon élévateur et de systèmes d’attaches pour des configurations de type fauteuils roulant.
  • Le A2 peut donc être un transport sanitaire polyvalent : patient sur brancard, patient handicapés sur fauteuil roulant adaptés, patients avec appareillages médicaux encombrant ou encore intégrer un lit médicalisé dans la cellule ou des patients valides et autonomes. On est donc sur un modèle très adaptable.

Le cas du patient handicapé : le patient type

Prenons le cas de monsieur Z, handicapé moteur et se déplaçant dans un fauteuil adapté à sa pathologie de type électrique. Monsieur Z doit se rendre en consultation. Néanmoins la prescription médicale de transport ne propose que deux cas de figure possible :

TAP ou transport Assis Professionnalisé sous la forme du taxi avec agrément pour le transport sanitaire assis donc conventionné, ou le VSL, Véhicule Sanitaire Léger. Le patient ne pourra que voyager avec un fauteuil adapté et donc pliable à l’aide d’un ambulancier ou d’un personnel. Cela entraine donc une nécessité de se transférer s’il en a les capacités. S’il ne peut assurer son transfert du fauteuil électrique au fauteuil standard le VSL ou TAP sera inapproprié.

A noter il existe une possibilité de facturer un forfait de 20€ supplémentaire en cas d’utilisation d’un moyen de transport de type TPMR par une société de transport sanitaire ou taxi conventionné. Mais forcément cela ne solutionne ni ne facilite les choses sur le fond.

Logique puisque la manutention d’un patient non autonome se fait à deux ambulanciers sauf cas de figure ou avec l’aide de matériel adapté Mais là aussi le patient devra être en capacité d’utiliser un disque de transfert etc. Cette notion implique donc d’avoir une capacité d’autonomie minimale.

Ambulance : Monsieur Z étant dans l’incapacité de se transférer de son fauteuil électrique à un fauteuil manuel et qui plus est dans un véhicule léger même avec l‘aide d’un ambulancier, on va devoir demander une prescription en ambulance (oui je sais certains praticiens ne jouent pas le jeu et on a vu, on voit encore des prescripteurs balancer des PMT en assis pour des patients non autonomes avec une mise en danger ++).

Là encore c’est un peu réducteur pour le patient, autonome à la base avec l’usage de son fauteuil électrique. Mais rien n’existe concernant une Prise en Charge Médicale remboursée pour le TPMR, Transport de Personnes à Mobilité Réduite, c’est-à-dire un véhicule spécifiquement adapté pour le transport des patients voyageant DANS leur fauteuil avec un hayon par exemple. Monsieur Z n’a donc pas d’autres choix possible. Si ce n’est à devoir régler son transport avec ses propres moyens ou disposer d’aide familiale ou autre.

Clairement je pense que cette solution permet à la fois de faire du transport partagé, de favoriser le transport des personne porteuses d’appareillages parfois encombrant, fauteuils etc et renforcer la sécurité du transport autant pour les patients que pour les ambulancier (manutentions limitées, risques de trouble musculo squelettique amoindri) sans oublier le côté éthique et du respect de l’intégrité du patient. Se voir porté toutes les 20 minutes c’est guère valorisant.

On peut aussi intégrer la notion préservation du positionnement : certains patients ont l’obligation médicale de conserver une position précise et adaptée dans leur fauteuil. Le passage en position allongé ou autre peut en effet si toutes les précautions ne sont pas mises en œuvre, poser des problèmes.  Pareil : qui n’a jamais réinstallé un patient dans la coquille de son fauteuil en se demandant si le positionnement était tel qu’il le doit ? Avec le risque d’escarres, de point d’appui et autres joyeuseté qui en découlent.

Encore une fois je simplifie volontairement pour donner une image du problème et les solutions.

Le cas du double brancard en ambulance de type A2

Là je ne m’avancerais pas pour des question d’éthique, de confidentialité du transport et de la sécurité des patients. Sur ce sujet je suis plus que mitigé et je l’assume. Mais là encore ce sont des situations à prendre avec du recul suivant le cadre.

Personnellement autant la mixité du transport TPMR et assis ne me choque pas autant équilibrer avec un patient en brancard peut me faire tiquer. A voir là aussi si ça devait se poser comme cas, dans quelle mesure et conditions.

Faciliter les Transports Inter Hospitaliers (TIH) avec l’ambulance A2

Il serait là autant une question économique que de logique et de logistique. Plutôt que de multiplier les transports sanitaires pour par exemple 6 patients changeant d’établissement en même temps mais ne nécessitant pas forcément une prise en charge individuelle l’ambulance A2 pourrait être pertinente. Le support de référence sur lequel se base cet article est intéressant puisqu’il mentionne l’exemple de patients partant d’une structure identique pour se rendre en balnéothérapie dans une structure externe. Durée du voyage 15 minutes, durée de la séance 1h.

  • Il faut donc autant de transport que de patient à l’heure actuelle. Le cauchemar logistique ! ici 6 ambulances, donc 12 ambulanciers si c’est du transport allongé.
  • Il faut donc pourvoir réserver les ambulances, synchroniser les arrivées et les départs
  • Il faut envisager les transferts de fauteuil à brancard puis refaire l’opération à l’arrivée en sachant que le fauteuil électrique et sa coquille adaptée à la morphologie d patient ne pourra pas forcément suivre donc X minutes dédiés à cette activité.
  • Il faut des transports assis pour les éventuels patients autonomes ou à peu près (mais non partagé avec des patients attendus sur d’autres sites car souvent ce sont des prises en charge très chronophages). On ne pose pas en effet les patients comme des colis.

C’est donc très vite une complexité sans nom, un coût astronomique et une organisation de chaque acteur complexe : structure de départ, ambulances ou VSL, structure d’arrivée, gestion du temps de soin, gestion du temps de transfert des patient….

En traduction l’utilité d’un moyen de transport de type ambulance A2 pour des structures de type SSR (soins de suite) et des structures de rééducation seraient, si on regarde bien, une solution à de nombreux maux.

Le VSL cette exception française que l’on ne trouve nulle part ailleurs

Le VSL ou Véhicule Sanitaire Léger est une exception française. A l’étranger ça n’existe pas tout simplement. La question qui se poserait alors c’est : le type A2 ne serait-il pas une évolution du transport sanitaire assis ? L’équipage n’en serait que plus sécurisé lors des manutentions, éventuelles installation de patients, la sécurité du transport serait renforcée car le conducteur serait concentré sur son itinéraire et le binôme lui cette fois ci dédié à ses patients. Là c’est un point de vue qui mériterait discussion.

On en parle pas de faire un « car » de patients comme certains vont l’imaginer à la suite de cet article mais bien de réfléchir à l’évolution des transports sanitaires dans un contexte économique très complexe et d’un avenir sombre. D’autant plus que travailler sous cette forme arrêterait enfin de classifier les ambulanciers comme des CHAUFFEURS. Bien que le temps de changer les mentalités il faudra patienter quelques années voire siècles.

Sans oublier le confort apporté à une vaste masse de patients qui jusque-là subissent le grand écart au détriment du confort et de la préservation de leurs pathologies.

L’ambulance Type A2 en conclusion

Je le redis ce n’est pas officialisé, c’est en discussion et comme souvent ça peut encore finir aux oubliettes. Le but de cet article est d’apporter un éclairage, une réflexion autour d’un sujet qui un jour deviendra peut-être une réalité. C’est quelque chose de déjà très intégré à l’étranger mais en France on ne fait jamais comme les autres. Avec une conjoncture économique qui pousse sans cesse à l’économie de tout et de rien pour conserver une dynamique il va falloir s’adapter.

Pour rappel le système de santé et de sécurité sociale français est un confort voire un luxe en comparaison avec ce qui peut se faire ailleurs.

Ensuite question éthique vous l’avez lu je n’avance que des solutions en corrélation avec le bienêtre et le confort du patient. Vous le savez tous les transferts des fauteuils sont parfois une torture pour les patients autant que pour les ambulanciers. Il faut donc aussi raisonner autour de ce sujet d’importance et essayer de l’intégrer à l’équation. Donc encore et encore NON je ne parle pas d’empiler des brancards et de faire tu transport partagé.

Quand à l’aspect professionnel cela rendrait peut-être les transports bien mieux encadrés et professionnalisés d’une manière plus évoluée avec des équipages formés et qui travaillent en équipe au lieu d’être en solo. Le VSL a été le fruit de nombreux coup d’éclat de ma part dans ma pratique. Avec des mises en danger potentielles, des prises de risques parfois. Je vois là la possibilité de jouer mon rôle d’ambulancier et non pas de chauffeur.

Bref l’ambulance de type A2 ce n’est pas pour de suite mais songez que le sujet est remis sur le tapis et qu’un jour peut être cette solution sera à envisager. Là encore espérons que certains chefs d’entreprise, plus financiers qu’ambulanciers, n’essaieront pas de corrompre ce mode de transport pour en faire une gagne-pain au détriment de la qualité du soin et du transport. Mais là aussi il n’y a qu’un pas que certains s‘imaginent déjà franchir. Et oui je reste réaliste 😉

Références

Je me suis basé en partie sur le mémoire de fin d’étude de Monsieur Laurent Facon, un mémoire que j’ai volontairement et en partie vulgarisé et simplifié pour le besoin de cet article. Pour les plus courageux je vous invite à le lire en intégralité. Pour information, Monsieur FACON est notamment le coauteur, avec Loic CADIOU, du manuel de l’ambulancier diplômé d’Etat. Je pense donc que ses références et le sérieux de ses recherches n’est plus à démontrer.

cca75d1ebfde847ffe6ffee493a579e5 Ambulancier : le site de référence Ambulance A2 : bientôt une réalité en France ?

Franck SIMON

Ambulancier Diplômé, j'ai crée ce site en 2009. Je souhaitais mettre à la disposition de tous un outil d'information à but pédagogique pour centraliser le plus d'informations possibles sur le métier d'ambulancier et ce qui l'entoure. Passionné par mon job j'essaie d'apprendre à chacun à mieux connaitre la profession et en parallèle offrir à mes collègues un outil pour garder leurs acquis à jour, et valoriser cette profession méconnue et mal aimée. Spécialiste du billet d'humeur acide j'aime bien taquiner mes collègues sur des sujets sensibles et enfoncer des portes

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