Petit billet du jour ce matin pour réagir à des règles du code de la route interprétées et pas toujours adaptées à la réalité. L’ambulancier est un professionnel de santé, un acteur de la chaine de soin et d’urgence on est d’accord sur ce point. L’ambulancier est donc amené au cours de ces missions à être mandaté sur des transports urgent à la demande du centre 15 ou du médecin généraliste.
Des mission urgentes pour les ambulanciers
La caractérisation de l’urgence de la mission restera toujours à la discrétion du médecin prescripteur. En effet sans être sur place au moment T impossible pour l’ambulancier de juger de la gravité ou non de son intervention, sauf s’il en est fait mention clairement dans l’appel par le SAMU Centre 15 (conversation enregistrée). A l’inverse sur intervention on pourrait penser que l’ambulancier reste seul capable de juger de l’urgence de la situation. Oui mais non.
Lorsque l’ambulancier est sur une intervention il prodigue gestes et soins d’urgence et transmet un bilan clinique concernant l’état du patient, voire un bilan flash dans le cas d’une urgence caractérisée au SAMU Centre 15 et demandant l’intervention d’une équipe médicale. Jusque-là on le constate bien l’ambulancier est un acteur de ces missions d‘urgences mais que sur la majorité des urgences vitales une équipe SMUR est envoyée au chevet du patient.
La conduite de l’ambulance sur les mission urgentes
La conduite de l’ambulance lors de l’intervention sur la mission ou encore le transport d’un patient vers une structure hospitalière à la demande du Centre 15 ou du médecin traitant pour un motif jugé urgent peut permettre à l’ambulance d’être considéré comme un véhicule prioritaire, ou à défaut d’un véhicule à facilité de passage. Le code de la route définit clairement les deux possibilités. Encore aujourd’hui certaines régions, certains responsables ou autre services contestent parfois cette possibilité mais c’est un autre débat.
Mais encore une fois cela est souvent dû aux interprétation du code de la route et aussi du refus de certains organismes qui refuseraient de considérer l’ambulance comme un véhicule d’intervention couvert par un numéro de mission urgente (cas de figure d’une mission transmise par le SAMU Centre 15). Mais là encore n’est pas la question. L’aspect juridique restera encore je pense longtemps problématique jusqu’à émergence d’un texte clair. Mais entre code de la route et bon usage des règles sur le terrain il y a parfois des choses qui sont fâcheuses. On vous avait déjà mis en main un mémento pour vous aider :
Conduite en urgence ne veut pas dire faire n’importe quoi
Mon billet résulte d’une expérience vécue il y a quelques jours dans une grande agglomération. J’étais au feu rouge quand une ambulance débarque derrière moi, bleus allumés, deux tons et collée à mon pare choc (mais bien comme il faut tant qu’à faire). D’une, la démarche n’est pas adaptée : jamais au grand jamais on ne joue au cow-boy avec un « pousses toi de là pti con ». L’usage des signaux sonores et lumineux doit être utilisé à bon escient avec l’intégration du facteur de stress que cela apporte sur les usagers : on me voit (pas en étant collé) et on m’entend.
Même si personnellement ça ne m’a pas fait sauter dans mon siège, cela peut être vite anxiogène pour de nombreux conducteurs, amenant ces derniers à prendre des décisions irresponsables et dangereuses pour eux comme pour les autres usagers : écarts, franchissement d’un carrefour sans prudence, mise au fossé, conduite non maitrisée.
Comprenez bien que vous coller au pare choc ne sert à rien. Ce n’est pas que vous n’êtes pas vu ou entendu mais que le véhicule devant ressent un danger, ou ne juge pas le franchissement suffisamment sécurisé, voire encore ne se juge pas capable de se rabattre en toute sécurité.
Second problème. Ce feu rouge était à droite bordée d’une voie de tramway donc interdite de chez interdite. A gauche une autre voie forcément avec un feu au vert mais sans réelle visibilité de ma part. Résultat : devant moi un véhicule avec un apprenti conducteur a franchi le rouge pour se mettre sur la voie de gauche avec prise de risque, pareil de mon côté.
J’insiste sur la non visibilité de la voie (haie/mur et voie arrivant de bais sans voir les possibles véhicules qui arrivaient). Ce jour-là pas de véhicule mais si par hasard un véhicule serait arrivé il n’aurait pas vu l’ambulance, mais juste deux véhicules civils en plein milieu de sa voie. Le conducteur inattentif aurait pu causer un accident (le feu étant vert pour lui).
A savoir que si accident il y aurait eu les torts étaient pour moi et le véhicule de devant à 100%. Allez ensuite expliquer à l’assureur que c’était pour céder la place à une ambulance. Cette dernière aurait-elle pu effectivement prouver de l’urgence de la situation ? Que ce serait-il passé en cas d’accident avec blessés ?
La conduite en urgence, une responsabilité plein et entière
Il faut comprendre une chose : la conduite en urgence doit être mesurée, adaptée et non génératrice de stress pour le patient, le conducteur et les usagers. Ce n’est pas quelques secondes ou quelques minutes de perdues qui vont changer quelque chose en dehors de très rares situations d’exceptions. Le fait de perdre quelques minutes peut sauver des vies en ne prenant justement pas de risques potentiels aux intersections.
La priorité est une règle qui implique la responsabilité du conducteur. Oui certes la législation explique qu’un véhicule prioritaire a le droit de franchir un feu rouge, un stop etc sans marquer quoi que soit come arrêt, qu’un véhicule doit céder le passage au véhicule prioritaire. Jusque-là OK.
Mais en aucun cas le véhicule prioritaire ne doit mettre en danger les usagers même si le risque semble minime. J’entends par là que votre responsabilité en tant que conducteur sera engagée DES QUE vous aurez fait prendre un risque aux usagers quels qu’ils soient. En clair : en cas d’accident c’est vous qui serez responsable.
Le franchissement d’un carrefour dot être fait au pas, en douceur et en anticipant le comportement de l’usager sans faire prendre de risques à QUI QUE CE SOIT.
Ambulances et urgence : l’importance d’être responsable
Je le dis et je le redis soyez responsable. L’urgence ultime c’est uniquement avec un médecin à bord. Je ne nie pas que les missions des ambulanciers et les transports réalisés ne nécessitent pas un transport vers la structure de manière rapide et sans perte de temps mais cela ne dis pas de se comporter comme des dingues. Roulez mesuré, roulez intelligent. Le plus important est de rouler fluide.
Le patient dans la cellule est déjà anxieux, l’usage des deux tons renforce cette anxiété. Les usagers aujourd’hui sont dans des véhicules insonorisés et le bruit est souvent étouffé. Pensez à rester VISIBLE : vu ET entendu. Le « je me colle au pare choc du gars devant en laissant le deux ton allumés » c’est inutile si vous constatez que le gars devant n’a pas de visibilité suffisante pour vous laisser passer.
Mais je vous rassure ça vaut pour tous les professionnels de santé et de sécurité : pompiers, policiers, gendarmes. Certains ont parfois des comportements assez prohibitifs. Comme toujours ce n’est pas une généralité et des cas isolés. Mais je le redis et je le martèle : le véhicule prioritaire sera RESPONSABLE en cas d’accident dans tous les cas de figures. Avoir un numéro de dossier SAMU ne vous sauvera en rien en dehors des possibles amendes pour franchissement de feu rouge, ou excès de vitesse. Si vous être reconnu comme à l’origine d’un accident ça va chauffer sévère pour le conducteur.
Sur une zone non découverte, avec de la visibilité LMITEE vous ne DEVEZ pas FORCER le passage. Soyez intelligent et ne prenez pas de risques pour rien. Si vous êtes avec un équipage SMUR ou autre au pire vous envoyez quelqu’un sécuriser le passage. Vous aurez l’air bien avec des victimes supplémentaires alors que vous êtes censé sauver une vie qui se trouve dans votre cellule sanitaire.
Intervention SAMU, SMUR et escorte policière
Pour aller plus loin dans la réflexion.
Cas de figure 1 : si vraiment l’urgence était ultime vous le savez une équipe du SMUR se déplace : domicile, jonction sur la route etc. Quand l’équipe repart le véhicule du SMUR, si c’est une VL, elle ouvre la voie. En général ils font ça de manière à fluidifier la conduite. Jamais vous ne verrez une VL SMUR forcer le passage si un risque potentiel se présente.
Si un accident est entrainé par l’obligation de priorité les assurances et autres partis n’auront aucun souci : ils se tourneront vers le Centre Hospitalier considéré comme responsable (personne morale). A ce niveau aucun problème à contrario d’une ambulance privée seule sans médecin à bord et qui va avoir plus de difficulté à se justifier. N’interprétez pas les textes, la réalité c’est toute autre chose sauf à moins d’avoir un excellent avocat et un dossier solide (levez le doigt ceux avec une entreprise qui vous couvriront à ce point).
Cas de figure 2 : l’escorte policière demandée par la régulation du Centre 15. Cette escorte se compose d’une patrouille de motards de la gendarmerie ou de la police. Ces derniers n’auront aucun mal à se faufiler et sécuriser les voies même en cas de feux rouges et permettent aux usagers de se ranger sans aucun risque de pris.
L’urgence n’est pas un sauf conduit à la connerie
Vous l’aurez compris j’insiste sur votre protection à tous niveaux. Laissez-les on dit, laissez les pompiers et autres acteurs de l’état faire sans vous comparer à : « wais mais eux ils le font bien » ça me fait penser à l’article « mais on a toujours fait comme ça » :
N’oubliez jamais que vous restez des acteurs privés (ce n’est pas péjoratif mais en dit long sur les risques potentiels) et que le conducteur de l’ambulance peut par inadvertance se retrouver avec des ennuis. Certes il faut toujours se couvrir : numéro d’intervention, signaux sonores et lumineux utilisés avec intelligence (je suis VU et ENTENDU) et modération. La perte de quelques minutes ou secondes ne changera pas la donne. Non rouler à 200km/h ne vous fera gagner qu’un temps très restreint et sans réel bénéfice avec le rapport gain/risques (c’est vérifié et calculé).
Conservez toujours en tête que la vie de votre équipage, de votre patient et celles des usagers de la route a bien plus de valeur qu’une prise de risque même considérée comme réduite. Le fameux risque réduit qui conduit à un drame entraine un prix qui va parfois payer à vie. Alors roulez intelligent…